Matthijs Vermeulen
aan
Ernst Levy
Amsterdam, 4 januari 1951
Amsterdam
Heerengracht 330
le 4 janvier 1951
Cher, vieux frère,
Voici alors L'Aventure de l'Esprit en langage français.
Tu m'as très touché au moment où, dans ce petit café de la Kalverstraat, pas dix minutes après ton arrivée ici, tu me disais que tu avais lu le livre en hollandais, et que tu l'avais trouvé bon. Je me souviens encore du regard de tes yeux, certainement je m'en souviendrai toujours. Pour moi cela valait la peine que tu t'étais donnée en me rejoignant ici pendant quelques heures. Peut-être aussi pour toi? Je le voudrais bien.
Si cela en est ainsi, je peux espérer que tu aimeras relire mon ouvrage dans une expression qui te sera plus habituelle et commode. En espérant cela je voudrais aussi que tu le critiques le plus sévèrement possible; que tu recherches, comme le plus âpre des adversaires, quelque défaut dans mes raisonnements. Car depuis nombre d'années j'ai compris, je sais, que nous avons besoin d'une base et d'une structure intellectuelle à toute épreuve, pour continuer, pour durer.
Mais quand tu auras vu (comme je crois) qu'il n'y a rien à reprendre, à refuser, à réfuter dans mon explication des causes et des choses, fais ensuite tout ce qu'il y a en ton pouvoir afin de propager une théorie, une doctrine définitive, qui au moment actuel est nécessaire.
Tu vois. Pour notre musique, la mienne ou la tienne, je n'ai jamais été pressé. Elle arrivera comme elle voudra. Mais pour l'Aventure de l'Esprit j'ai des désirs, des ambitions. Il n'y a rien de personnel là-dedans.
Agis donc comme tu pourras. Cela veut dire: appelle pour ce livre un traducteur anglais. Il doit être trouvable, en croyant, en sachant qu'il sera utile.
Je t'embrasse en t'envoyant, comme chaque jour, mes meilleurs vœux,
ton
Matthijs Vermeulen.
Verblijfplaats: Amsterdam, Bijzondere Collecties UvA