MATTHIJS VERMEULEN

Matthijs Vermeulen

aan

Donald Van der Meulen

Laren, 2-4 augustus 1966

2 août '66

Mon cher Donald, chère Janine,

chère Dominique, cher Josquin,

C'est Théa qui t'écrit, c'est moi qui lui dicte cette lettre. Ne t'inquiète pas pour cela. Je pourrais écrire aussi, mais cela me fatiguerait trop. Il y a 15 jours que j'ai encore une fois quitté l'hôpital, où on avait du me mener d'urgence à cause d'une défaillance dans les voies urinaires qui menaçait de causer une urémie. On dit à l'hôpital, et Thea le dit aussi, que j'ai été encore pas loin de l'article de la mort, mais moi je ne me suis aperçu de rien, sauf d'une très grande fatigue qui après ma sortie de l'hôpital avait encore augmenté et dont je me remets depuis à petits pas, à petits pas. Pourtant il m'a taquiné beaucoup que je n'ai pu donner aucun signe de vie après ma dernière lettre à laquelle tu as si gentiment répondu. Je sais que pendant cet intervalle tu es parti en vacances.

3 août

Ça change les idées et je trouve que tu en avais besoin parce que tu pensais trop à moi ce qui n'était pas bien. Alors continuos. C'est indicible la séquelle et tous les contrecoups qu'amène une radiothérapie. Cela a commencé pour moi il y a dix mois et ce n'est pas encore fini, bien que ça me paraît toucher à sa fin. Pense donc: 28 radiations dans une moitié de la tête, en face et en profil. A la fin je n'en pouvais plus et aux deux dernières j'ai dû véritablement me traîner. Mais j'avais décidé que ça serait fait et ça c'est fait.

Alors, une semaine après un mal après l'autre est arrivé dans ce même côté de la tête, dans le crâne, le front, les mâchoires, le nez, qui a été six mois bouché et qui de temps en temps me donnait des coups de butoir comme si on tapait avec un marteau dessus. Ça a fini pour l'instant avec 3 abcès, dont le troisième tout juste sous l'œil droit, et c'est presque à considérer comme un miracle que l'œil n'ait pas été atteint. Il me reste toujours des douleurs dans les dents p.ex. Tu peux t'imaginer que ta proposition de venir nous visiter arrivait fort mal, ce qui est en partie ma faute parce que je ne t'ai pas suffisamment tenu au courant. Remarque avec ça que je parle fort difficilement et que depuis que je suis malade je n'ai pu voir personne, pas même Jany Roland Holst, excepté une seule fois pendant 5 minutes.

Voilà le principal que j'avais à te raconter pour aujourd'hui. Ce que je veux ajouter c'est qu'après avoir dit beaucoup de mal des séquelles et des contrecoups de la radiothérapie, c'est que le travail qu'elle fait dans ma tête est suprêmement admirable et que je n'y comprends rien, tellement c'est logique et compliqué. Alors espérons toujours le mieux –

4 août Tout se passe heureusement dans une humeur encore assez joyeuse et avec le sourire. Je dors beaucoup, je marche de nouveau seul quoique à façon. Je mange pas mal. Je ne maigris plus, je crois, bien que je n'engraisse pas non plus. Je lis très peu parce qu'après un quart d'heure je suis complètement à souffle; je ne vais pas au jardin, mais il n'y a pas grand dommage parce que l'été après la mi-juin a été extrêmement pluvieux et froid. A mon grand regret je ne peux pas encore visiter ma petite cabane, qui a été restauré par Odile. Mais j'ai encore une grande envie de me remettre au travail.

Voilà que cela te suffise pour le moment. Je vous embrasse tous les quatre bien affectueusement,

Thijs

Verblijfplaats: Amsterdam, Bijzondere Collecties UvA