MATTHIJS VERMEULEN

Componist, schrijver en denker

19620117 Donald Van der Meulen aan Matthijs Vermeulen

Donald Van der Meulen

aan

Matthijs Vermeulen

Aubervilliers, 17 januari 1962

Aubervilliers le 17/1/62

Cher Thys, Chère Théa

Chère Odile,

Hier votre gentille carte retrouvée le soir rue Godefroy à Paris. J'avais justement pensé que je vous envoie mes vœux. Mais quelle honte les vôtres sont arrivés avant. Je vous en remercie et formule aussi les meilleurs possible pour vous trois. Je pense que les santés sont toujours bonnes. De notre côté grand changement: Nous avons quitté le Nord − Nous devions le faire au mois d'octobre mais Janine a été malade alors je suis rentré pour novembre et décembre à Dechy. Janine va mieux, un peu, mais elle est toujours arrêtée depuis octobre dans son travail. Elle souffre d'une annexile dans les organes. Extérieurement cela se présente sous forme d'une boule dans côté gauche du ventre à la hauteur des ovaires. Elle est soignée par un radiesthésiste homéopathe qui veut éviter à tous prix l'opération. Cela semble réussir mais la résorption est longue.

Tu peux imaginer Thys que dans un cas aussi grave je n'ai pas hésité à changer de maison. Tu sais ce que l'on peut penser d'une maison. J'ai eu du mal à en sortir. Sans un sou devant moi j'ai réussi tout de même à transplanter mes Pénates à Paris grâce à ma belle-mère qui nous avance beaucoup d'argent et mon beau-frère qui nous prêté une remise pour mettre le gros de nos meubles. Pour le reste j'ai loué une camionnette et j'ai transporté le nécessaire à Paris dont le piano qui a été bien gentil de me suivre seul sur les routes. Le restant est à Douai. Le piano parce que Dominique et Josquin commencent leurs études.

C'est dans la nuit de Noël que j'ai terminé mon dernier voyage.

Il y aurait beaucoup à raconter sur cette fuite mais le principal est que tout s'est bien passé. Que nous sommes réinstallés rue Godefroy sous le toit étroit de ma belle-mère refuge que l'on apprécie hautement lorsque l'on est traqué. Là, la vie s'organise pour ses quartiers d'hiver. J'avais entassé au mois de septembre du charbon qu'un client américain m'avait donné en pourboire. Le chauffage y est facile ici. Les enfants sont enchantés de leur nouvelle école chez les sœurs. Ils en reviennent même seul sous l'œil vigilant de leur mère qui les regarde du 3ème. Le matin c'est la grand-mère qui les conduit. Cela était impossible avec les kilomètres d'éloignement de Dechy. Les petites emplettes aussi sont plus faciles - Janine ne peut plus faire de voiture. Il y a quinze jours elle était encore très fatiguée. Elle reprend un peu maintenant - Pour ma part j'ai retrouvé mon employeur d'octobre et je fais de la plomberie sur un chantier d'Aubervilliers d'où je vous écris.

Je pense que vous voudrez bien nous pardonner le retard à vous donner des nouvelles en imaginant ce déménagement, cette installation dans ces lieux étriqués...

Alors encore une fois Merci pour la belle carte et bons baisers de nous tous

Donald.

[ondertekend door Dominique en Josquin, naschrift van Janine]