MATTHIJS VERMEULEN

Componist, schrijver en denker

19490522 Donald Van der Meulen aan Matthijs Vermeulen

Donald Van der Meulen

aan

Matthijs Vermeulen

Louveciennes, 22 mei 1949

Louveciennes le 22 mai 1949

Cher Thys, chère Théa,

chère Odile,

Il y a longtemps que vous avez eu une lettre de Louveciennes n'est-ce pas? aujourd'hui c'est dimanche: je viens de me réveiller le soleil est magnifique dans l'arbre immense que je vois de mon lit à travers la fenêtre et qui est si bien en relief avec cet éclairage puissant. Clarisse s'est déjà esclaffée de rire tout à l'heure lorsque j'ai ouvert la fenêtre. Tant de lumière d'un coup l'étonné toujours et la réjouit. Maintenant elle babille tant elle peut et s'amuse sur son pot. Trudi est parti faire les courses et le calme de la matinée m'invite à penser à vous et vous écrire – Miaw ne m'en veuilles pas que cette semaine je n'aie pas envoyé de lettre. J'ai tellement bricolé ou plutôt travaillé car j'ai déjà le fruit de mon travail. Avec mon vélo pour lequel j'ai passé tant de temps je suis allé cette semaine à Paris tous les jours: Pour aller je gagne 3/4 h.sur le train et au retour le temps est le même – Naturellement je trouve ça plus sain pas fatigant quand est resté toute la journée sur une chaise. Et puis j'économise mes 300x par semaine. Le matin la nature est splendide et sent si bon. Le soir rien n'égale le disque rouge du soleil qui descend au milieu de l'avenue de la Gde Armée derrière l'arc majestueux – Je passe deux fois par jour par l'Etoile et ça me fait plaisir dans [lees: d'en] faire le tour – Ensuite je descends à droite des Champs pour passer à côté du Palais de Chaillot et juste au pied de la Tour-Eiffel – N'est-ce pas un itinéraire magnifique devant tous ces grandeurs? J'ai déjà connu les bonnes averses mais je suis prudent je pars toujours en short et mon complet bien empaqueté. (Au début que j'étais ici au garage je me suis acheté une veste et un pantalon de travail pas ouvrier mais pas chic c'est tout ce que j'ai aussi pour le dimanche... de ton beau complet gris que tu m'as donné en 46 je n'ai plus que la veste qui m'est déjà trop étroite, le pantalon s'est fendu un dimanche après-midi alors que je me baissais avec Clarisse dans les bras pour ramasser quelque chose et ça un peu avant de faire une visite!!!)

24-5.

Je continue maintenant ma lettre au garage. Hier soir j'ai reçu ta belle lettre Miaw du 19 qui m'a fait tant plaisir. Tes lettres ne sont pas seulement pour moi une belle source profonde et intime où il faut venir et revenir – Pour Trudi aussi qui les lit avec beaucoup de compréhension et recueillement – Elle vous envoie de bons baisers à tous les trois.

Mon dimanche que j'avais commencé à vous raconter s'est passé en une baignade à la maison tout d'abord de ma fille dans le tub que j'ai rapporté il y a quelques mois puis de moi (dans le même...) puis de ma femme (aussi dans le même...) Entre nous je suis devenu un maître baigneur car c'est moi qui baigne ma fille et ma femme. Trudi était un peu fatiguée pour se baigner elle-même – Après lui avoir fait un bon shampoing le bain lui a fait beaucoup de bien. Nous sommes ensuite allés nous promener un peu dans le village. L'air était bon et suave. Le printemps sentait partout – Il était sept heures du soir – Nous avons bavardé un peu avec Mme Durindel qui dit que Clarisse te ressemble, Miaw – Et puis nous sommes rentrés dans notre petit mais agréable logis. Tout était en ordre (et pour ça j'avais fait quelques corvées le matin) et nous nous plaisions à y entrer – Un luxe y est aussi rentré: nous avons acheté une bouteille de gaz et un réchaud pour faire la cuisine! Trudi est au 7e ciel de n'avoir plus à casser du bois et manier un feu salissant. Et puis le matin un thé est vite fait avant que je ne parte je sers bien souvent ma femme et ma fille encore endormie.

Voilà un peu de ma vie quotidienne entre le foyer et le travail qui marche bien (scribouillard ça me va tout à fait j'ai un sens de l'ordre de la précision que je m'amuse à aiguiser ainsi que la patience ce qui à mon grand étonnement ne me donne pas le mal que j'aurais cru devant des liasses de papier je demeure d'une impassibilité que me donne la force de l'endurance au travail pour la faire disparaître. Et elle disparaît toujours...) Il n'est plus de perspective à l'infini qui me décourage en l'entreprenant. Je sais que tout a une fin. Que rien se résiste au travail régulier avec lequel on entreprend une chose. De même que cette route longue longue qui menait à Amsterdam et dont le point final était triple (dans le coup de sonnette). Étudié, appris, sur de la matière non intéressante ça reste [j'ai] tout de même appris, étudié, n'est-ce pas? Ça me servira.

Tu me demandes Miaw de te promettre d'être prudent avec ma remorque. C'est promis Miau. Jeudi c'est l'Ascension et je vais sortir pour la première fois [–] ne t'inquiètes pas je connais les embûches (du moins beaucoup) de la route (tu es au courant de mes expériences automobiles et motocyclistes...) et je suivrai bien ton conseil. Je te remercie de me rappeler à l'ordre, on ne l'est jamais trop... J'espère faire une belle promenade vers ST Nom la Bretèche, tu vois le coin est tranquille.

Cher Miaw merci encore de ta lettre. Si tu savais comme je respire tranquillement en la lisant et comme mon cœur est au bord de mes yeux. Je t'aime aussi beaucoup ô tant plus qu'avant! Raconte moi ton Odile je t'entends si bien parler d'elle. Je t'embrasse bien fort ainsi que Théa et Odile.

Donald.

Je te dirai après avoir fait des essais si Amsterdam-Paris est possible. Je sais que mes vacances seront du 12 au 29 Août –