Nadia Boulanger
aan
Matthijs Vermeulen
Gargenville, 22 augustus 1925
[plaats en datum poststempel:] Gargenville 22-8 25
Mon cher Vermeulen,
On ne s'excuse pas − quand on sait que l'on a tort − mais si, d'une part, je mène une vie tyrannique, d'autre part, j'ose à peine vous témoigner une affection, une admiration que j'ai honte de savoir impuissantes. Alors je ne vous ai pas écrit, faute de temps, faute de courage. Pourtant, il m'en coûte trop de vous laisser penser à mon indifférence et je me résigne à vous envoyer cet inutile petit mot. Je comprends si bien votre rancœur, votre lassitude − et votre agacement devant des intentions inachevées toujours − d'autant plus que les excuses que vous pouvez accepter ou trouver ne font que transposer le problème − sans changer le fait. Et la force se sent devenir faiblesse, à n'être jamais employée − si je composais et que l'on jouât mes œuvres, je n'oserais plus vous écrire du tout.
Mais pour n'avoir pas à m'accuser d'usurper une place que vous occupez de droit, je n'en suis pas moins honteuse devant vous − A quoi cela sert-il? A rien − et c'est parce que je le sais et le sens, que je ne sais que vous dire. Mais jamais je n'abandonnerai la lutte − je crois beaucoup trop en vous pour le pouvoir.
Bien fidèlement avec vous
Nadia Boulanger
[dagaanduiding in poststempel diffuus, maar aan de hand van antwoord MV van 23 aug. kan 22 worden aangenomen]
Verblijfplaats: Amsterdam, Bijzondere Collecties UvA