MATTHIJS VERMEULEN

Componist, schrijver en denker

19481229 Donald Van der Meulen aan Matthijs Vermeulen

Donald Van der Meulen

aan

Matthijs Vermeulen

Parijs, 29 december 1948

Paris le 29 Décembre 1948

Cher Miaw, chère Théa,

Eh bien! la voici cette fin d'année, cette année que je voudrais oublier à tout jamais et c'est probablement ma dernière lettre de 1948 à vous.

Nous avons passé un beau Noël pour la première fois sous notre toit. J'avais pensé depuis longtemps à faire mon arbre mais n'avais jamais eu le temps de le réaliser finalement la veille de Noël à midi j'ai couru à 200 m d'ici et ai trouvé un petit arbre et des parures. Trudi était déjà désespérée de ne pas avoir d'arbre. Aussi improvisé qu'il fut aussi charmant et beau fut-il. Avant la messe de minuit je l'ai installé et embelli de fleurs œillets et mimosas de parures d'argent et de bougies naturellement. Trudi suspendit les délicieux fondants de Delft que le grand-père avait envoyés. Ce petit travail était fait dans la salle à manger qui est séparée de la chambre à coucher par une porte à vitres où Clarisse était supposée en train de dormir. Mais elle avait flairé l'esprit extraordinaire de fête! et elle se penchait hors de son lit pour arriver à la hauteur du carreau et regarder ce qui se passait. Pour mieux voir elle prit son biberon et cassa un carreau... Enfin peu avant la messe elle dormait déjà et nous mîmes au pied du sapin nos cadeaux. Trudi avait un beau gilet pour moi en laine et moi une culotte chaude pour elle, un crucifix sur un bois foncé qui descendait du plafond à la droite de l'étoile du sapin, un petit Jésus et un ange en faïence au pied de l'arbre. Dans l'atmosphère bien chaude de la chambre le souvenir joyeux de la naissance du Christ nous rendait heureux, tant il flottait tendrement.

Et puis nous entendîmes la messe dite pour Josquin. J'ai écrit à Aline comme cette messe m'avait profondément pénétré. Jamais sentiment religieux fut plus grand en moi. Aline a chanté divinement. La joie en cette nuit la communion à travers cette belle voix aimée avec ce frère regretté m'était bien douce en même temps que déchirante. Le curé, grippé, ne fit pas de sermon. Rien ne troubla ce recueillement nocturne où je pensai beaucoup à toi, à vous.

Trudi fut très touchée aussi de la beauté de l'instant et très heureux tous deux nous retrouvâmes notre arbre et nos cadeaux avant le sommeil bienfaisant.

Le lendemain matin Clarisse émerveillée montrait du doigt son arbre en exprimant le troisième mot qu'elle connaisse, après papa et mama, "da!" plusieurs fois comme elle le fait maintenant tous les matins. Ses yeux brillèrent bien et son aise fut bien grand de cueillir à cet arbre tant de crottes et bonbons délicieux dont Roland nous avait envoyé aussi un sachet.

Clarisse comprend de mieux en mieux le français avec sa nou-nou, et toujours autant l'allemand avec ses parents. Je l'aime de plus en plus et le matin j'ai aussi peine à la quitter. Elle aime bien ses parents. Le jour passe malheureusement si vite et si loin d'elle. Enfin les jours de fête n'en sont que plus beaux.

Encore une fois mes meilleurs vœux pour la nouvelle année, de nous tous. Un des mieux est de vous voir au printemps.

Bonne année bonne santé!

Donald

Anny m'a répondu qu'elle ne pouvait plus surtout pas avec un manque de confort trop grand...