MATTHIJS VERMEULEN

Componist, schrijver en denker

19481004 Donald Van der Meulen aan Matthijs Vermeulen

Donald Van der Meulen

aan

Matthijs Vermeulen

Neuilly-sur-Marne, 4 oktober 1948

Ville-Evrard

S et O.

Le 4 Octobre 1948

Cher Miaw, Chère Théa,

Il y a déjà quelques jours que j'ai reçu ta lettre Miaw. Pardonnez-moi encore le retard que j'apporte à donner de mes nouvelles mais la cause de ce dérangement est maintenant passée et je puis vous expliquer tranquillement. Notre "kermesse sportive" a eu lieu hier. Nos efforts pour faire un terrain de sports d'un terrain vague, pour organiser cette fête ont été couronnés de succès. Le beau temps, la chaleur s'est mis de notre côté et nous avons fait nos jeux, nos mouvements d'ensemble notre match et le reste sous un soleil de plomb. Aujourd'hui il fait de nouveau froid... J'ai donné beaucoup de mon temps pour organiser, minuter, cette démonstration officielle des nouvelles méthodes de guérison psychiatriques. Coordonner tous ces esprits plus ou moins malades ne fut pas chose facile. Le résultat a été merveilleux et concluant. Tu diras, Thys peut-être que je m'éloigne un peu de mes soucis personnels mais je trouve que je leur devais ça.

C'était donc cela qui l'éloignait un peu de vous.

Je te remercie Miaw de ta dernière lettre. Tu me demandes ma prochaine adresse. En toute vraisemblance: 12 place de l'Eglise Louveciennes. Oui! j'en reviens à mon grenier puisque Christian ne peut s'occuper de moi cette année à Lyon. Je suis en train de faire des prospections à Paris pour mon travail. C'est la seule chose qui me retient encore ici. Je préfère que Trudi ne revienne que lorsque j'aurai un travail assuré. D'autant plus que j'ai à aménager encore un peu mon "grenier", il n'est pas très accueillant et avant que Trudi ne rentre je voudrais bien le rendre tel. L'intérieur de sa mère est tellement propre et net que la différence serait trop grande. Je te remercie de l'aide financier que tu me fais, il sera béni, surtout au début de cet hiver où il me manque un poêle et bien d'autres choses. L'avenir que tu me fais est bien rassurant.

Roland m'a écrit il y a quelques semaines qu'il voulait bien faire des projets d'avenir avec moi. Je me demande lesquels. En tous cas c'est gentil à lui de penser à son petit frère. Anny me gâte toujours avec ses petites lettres et me tricote des chaussettes de laine n'est-ce pas gentil? Il est doux de sentir que [de] tous côtés on est soigné. Mais les côtés les plus doux sont Vienne et Amsterdam pour moi. Je n'oublierai jamais toutes les bonnes lettres que vous m'avez écrites pendant ce temps d'isolement. Quelle chaleur cela peut donner à l'âme, vous ne pouvez peut-être pas vous l'imaginer et je dois vous le dire pour exprimer ma reconnaissance.

L'automne entre temps s'est répandu sur tous les arbres des environs avec ses couleurs chatoyantes. Les jardins sont pleins de ces feuilles que la mort a rendues si tendrement belles. Elles apportent à mon état d'âme un bonheur morose. J'admirais ce matin dans les allées ces petits cadavres auxquels je voudrais à tous montrer mon amour en les relevant tendrement et leur donner un semblant d'immortalité. Je me mis ensuite à écrire quand de Vienne m'arriva un petit paquet-lettre avec du papier et des enveloppes. Sur la plus grande enveloppe se trouvaient, collées de la main de ma chère Trudi, quelques feuilles de vigne vierge qui m'apportèrent le reflet de l'automne viennois. Combien de fois, Miaw avons-nous admiré ensemble la beauté de ces feuilles rougeoyantes à Louveciennes? Elles réveillèrent en moi bien de beaux souvenirs, et surtout me firent penser à toi. Les aimes-tu toujours?

Chère Théa, je vous souhaite d'être toujours en bonne santé. Je vous embrasse tous deux bien fort en vous disant au revoir. Je pense bien à vous et vous écrirai plus souvent maintenant.

Miaw encore un bon baiser de ton petit

Donald

P.S. pour le coli tu as bien fait je pèse vraiment assez!