MATTHIJS VERMEULEN

Donald Van der Meulen

aan

Matthijs Vermeulen

Neufchâteau, 2 mei 1959

Neufchâteau le 2. Mai 1959

Cher Miaw,

Chère Théa chère Odile,

Je n'aurai pas de temps d'écrire une bien longue lettre ce soir mais je ne veux pas que le muguet des Vosges attende plus longtemps pour vous apporter le bonheur que je vous souhaite à tous trois. En vous embrassant bien fort à cette occasion je souhaite que vous soyez toujours en bonne santé comme nous ici. Le printemps est un peu gâté par la pluie et le froid. Encore quelques rhumes et l'été sera là.

Pour ma part personnelle je suis en excellente forme. Malgré cette écriture peu soignée qui témoigne de ma hâte seulement je suis content de moi. Il faut dire une chose: depuis le 12 février exactement entre Nancy et Valenciennes, ne l'ai je pas déjà écrit?, j'ai recommencé la lecture de l'Aventure. Merveilleuse Aventure en vérité que je recommencerais à plaisir. Depuis ce jour Miaw, je te suis mieux, je crois t'avoir rejoint. Sache que j'arrive grâce à toi à de belles hauteurs. Je tâche de poursuivre au mieux. Je me souviens un conseil de toi: ne pas hésiter à se donner du fouet. Ce début d'année a été crucial pour moi. Je te raconterai cela un jour.

Mais je t'ai laissé trop longtemps sans nouvelles. C'est incroyable le travail qui se présente pour ces vingt cinq gars dont on a la charge. On est l'heureux père moins quatre? Enfin j'espère que vous ne vous serez pas trop inquiétés sur notre sort tout va bien je vous donnerai bientôt amples nouvelles. J'ai pensé ces jours-ci à deux choses concernant vous et la Hollande − d'abord pour la garde de nos enfants croyez-vous qu'il serait possible de trouver une jeune hollandaise par votre intermédiaire ou celui d'Anny peut-être, qui pourrait être intéressée par l'étude du français (la faculté de Lille est à 30 km. Au fait savez-vous que Janine est à Douai et que j'y serai bientôt?) par les enfants, par le salaire aussi...? J'aimerais bien que Dominique et Josquin entendent du hollandais.

Et puis la deuxième c'est que nous pensons (enfin) dans quelques mois baptiser Josquin. La marraine sera une collègue à Janine qui habite Douai. Le parrain j'aimerais bien le trouver parmi vos compatriotes pourriez-vous favoriser ce désir? Je vois un musicien....

Je ne sais pourquoi en écrivant ces dernières lignes m'est revenue tout à coup la pensée de la mort d'Eduard Van Beinum. J'ai été très touché par cette nouvelle passée presque inaperçue dans les quotidiens. Seul un journal de l'Est (la Liberté de l'Est) avait un article. Je ne sais précisément pourquoi j'ai été si touché par cette mort mais j'ai pressenti que cela avait dû vous faire de la peine et j'hésite à mettre cette coupure que je garde depuis dans mon portefeuille mais peut-être le seul écho parvenu dans cette région ne vous sera pas un rappel trop pénible j'espère.

En vous embrassant encore bien fort tous trois

votre Donald.