MATTHIJS VERMEULEN

Matthijs Vermeulen

aan

Donald Van der Meulen

Amsterdam, 23 februari 1949

Amsterdam

Heerengracht 330

le 23 février 1949

Mercredi-après-midi

Mon cher petit Donald,

Chères Trudi et Clarisse,

C'est avec participation entière, mon cher Donald, que nous avons lu tes aventures de l'installation de ta radio, et le récit de ta visite matinale, le 15 février, à la tombe de Fofo. J'approuve l'achat de ton poste et j'espère qu'il vous procurera beaucoup d'heures d'agrément, de joie, de musique, et à Trudi en particulier maint écho de sa bonne patrie. La piété avec laquelle tu as remémoré l'anniversaire de Fofo, nous est allée droit au cœur. Ce jour là je lui portais toujours un bouquet de perce-neige, le matin dans son lit. La dernière fois ce fut en 1945. L'année suivante il n'y en avait plus assez, car je les cueillais toujours, suivant le nombre de ses années. En 46, il n'y en avait que juste quarante, c'était l'âge de Thea.

Hier Thea a écrit à son banquier pour lui donner l'ordre de te faire encore un envoi ce mois-ci de cent florins. Mais ensuite, mon petit, nous sommes obligés d'interrompre nos contributions pendant un certain temps. Jusqu'à ce que nous ayons un peu réglé nos propres comptes, ou jusqu'à ce [que] je reçoive un nouveau prix littéraire!! Mais ça a été pour nous un vrai plaisir de pouvoir te rendre une partie des bienfaits que j'ai reçu de toi pendant la dernière année de la guerre. J'espère que maintenant tu réussiras à te débrouiller provisoirement. S'il t'arrive une difficulté inattendue, fais-nous toujours signe, et on pourra voir.

Odile continue d'aller très bien. Thea ne la nourrit plus; à l'hôpital on lui avait donné de la pénicilline pour supprimer un peu de fièvre, mais cela semble avoir tari aussi la source de lait. Elle l'a regretté au commencement. Mais le biberon est aussi commode et pas moins bon. Du reste je ne vois pas comment Thea, avec tout ce qu'elle a à faire (depuis le 15 elle a repris toutes ses occupations) aurait pu fournir les quantités de bonne boisson qu'Odile aime à avaler. Jusqu'ici elle pousse surtout en longueur. Si elle continue comme ça son premier berceau sera bientôt trop petit. Néanmoins elle est bien dodue et a une chair et une peau magnifiques. Elle est très joyeuse, rit de la façon la plus espiègle. Je crois qu'elle est remarquablement intelligente. Elle aime déjà beaucoup la compagnie et une bonne petite conversation! Mais elle donne aussi pas mal de travail, tu comprends.

Je n'ai pas plus de temps aujourd'hui. Tu dois encore patienter pour une longue lettre. Chaque matin à 8 heures je suis à ma table de travail. Les derniers quinze jours j'ai eu une sorte de grippe bien carabinée. Elle n'a pas réussi à me coucher, mais j'en ressens quand même une certaine fatigue. Il faut que je tire le plus grand profit des heures qui me sont disponibles.

Cela ne doit pas te retenir à nous écrire de tes bonnes lettres, même si tu ne reçois pas de réponse. Si tu savais comme je suis terriblement en retard avec Roland, avec Anny, avec un tas d'autres correspondants! Comment va le petit chat? Est-il resté? Peux-tu recevoir Hilversum? Ici avec du mal, parce qu'il est horriblement gêné par Leipzig je crois! C'est idiot mais comme ça. Je le sais par des amis. Nous n'avons pas de poste. Nous ne trouverions même pas le temps d'écouter!

Ça a été une chance inouïe d'avoir eu un hiver si doux. Les hérons sont déjà de retour avec une avance de cinq semaines. Et tout le monde qui prédisait en Octobre un hiver rigoureuse. Sauf moi, d'abord parce que je n'en voulait pas, et ensuite parce que les oignons n'avaient que deux peaux, et encore à peine! Mais personne ne connaît ce truc par ici.

Bien le bonjour à tout le monde de Louveciennes, particulièrement à Aline. Dis-lui en passant que je pense souvent à elle.

Alors mon petit Donald, à la prochaine. Nous t'aimons beaucoup, tu peux en être sûr et certain. Thea t'embrasse avec Trudi et Clarisse. Moi aussi et bien fort,

ton Matthys

Verblijfplaats: Amsterdam, Bijzondere Collecties UvA