MATTHIJS VERMEULEN

Componist, schrijver en denker

19481011 Donald van der Meulen aan Matthijs Vermeulen

Donald van der Meulen

aan

Matthijs Vermeulen

 

Louveciennes, 11 oktober 1948

 

Louveciennes

le 11.10.48

Cher Miaw, chère Théa,

Vite un mot pour vous dire la joie que j'ai eu de retrouver Louveciennes et la vie "libre". Oui! depuis samedi après-midi quinze heures je suis de nouveau libre! J'ai réintégré mon petit grenier, 12 place de l'Eglise, d'où je vous écris en ce moment après ma première journée de travail depuis longtemps. Car, j'ai repris du travail... Pas du tout ce que je voulais mais plutôt que de moisir à l'hôpital j'ai commencé ce travail d'usine ce matin que je n'aime pourtant pas beaucoup. C'est une usine de câbles électriques où je ne ferai sans doute pas de vieux os. Ce que j'y fais? tout le contraire des Parthes: des rouleaux et des rouleaux de fil sont là épars et il faut les "embobiner" et pour cela les sonder bout à bout. Après une bobine que l'on surveille dans sa ronde sur la machine, vient une autre, la journée passe et l'on approche de l'infini. Le tout se passe à Clichy ce qui me fait 1 heure de chemin de fer ça ne me passionne pas comme vous le pensez bien. Quand je reviens le soir je dine chez Mme Battedou dont la bonté est sans limite pour moi comme elle le fut aussi pour Trudi. Voilà ma dernière façon de vivre.

J'ai revu presque tout Louveciennes qui m'a fait un accueil charmant à grand renfort d'invitations y compris mon proprio avec qui je suis dans les meilleurs termes (sic). J'ai commencé par passer un premier dimanche magnifique! Le matin sans que rien ne motive mon réveil, j'ai ouvert les yeux sur un beau et frais matin ensoleillé d'un dimanche d'automne... Les cloches sonnèrent et me firent voler du lit, me faire beau pour le bon Dieu et me poussèrent dans son église. Quelle lumière bénie se répandait sous ses voûtes accueillantes à travers les vitraux que le soleil levant illuminait de toutes ses forces. L'autel était splendide et l'atmosphère si belle. Que mon bonheur eût été grand, plus grand encore! si mon être aimé avait été près de moi. J'aurais voulu partager cette illumination avec lui. Après ces minutes d'extase, je rendis visite à Fofo. Quelle belle et sauvage nature règne sur son carré de terre. Les roses tendres sont enveloppées de liserons aimants. Quelle vie trouve-t-on là! C'est l'image d'un cœur de vingt ans qui me touche à travers cette verdure...

Sur ces deux chaudes bases s'échafauda mon dimanche nostalgique. Je pensai beaucoup à vous aussi. J'espère que tout va bien chez vous et attends de vos nouvelles ici.

Je vous embrasse bien fort tous deux et un gros baiser pour Miaw

Donald

 

P.S. bien sûr je suis dans la purée....