MATTHIJS VERMEULEN

Componist, schrijver en denker

19590511 Donald Van der Meulen aan Matthijs Vermeulen

Donald Van der Meulen

aan

Matthijs Vermeulen

Neufchâteau, 11 mei 1959

Neufchateau le 11/5/59

Cher Thys, chère Théa chère Odile

T'ai-je déjà écrit, puisque ces derniers temps il m'arrive si souventes fois de le penser, que j'ai le sentiment de te suivre, de te ressembler, de te rejoindre? Tu ne peux savoir la joie que j'en éprouve, cette joie de gosse qui pense à son père. C'est une chose à laquelle je n'avais jamais pensé aussi loin que ma mémoire peut remonter vers cet adolescent où le désir de ressembler de faire comme son père se rencontre si souvent. Et c'est maintenant que m'apparaît cette sensation qui a créé renforcé en moi ce désir. Mais c'est aussi une opération de "l'Aventure". Plus je pense à ce livre, ce Toi qui me suit partout plus j'éprouve cet extase et du temps passé et de la vie et de l'avenir. Je te jette ces quelques lignes sur le papier après avoir relu un compte rendu dactylographié que je te joins dans l'enveloppe. Si tu as le temps lis le et dis moi un peu l'effet que ça te fait.

Quelques lignes qui seront peut-être les derniers de Neufchâteau. Je vais quitter ce fief et Rebeval et le Ministère de la Justice − Je dis peut-être les derniers car j'ai une sauvage envie d'écrire en ce moment de t'écrire. Dans les quelques jours qui me restent cela m'étonnerait que je ne sois pas amené à te noircir quelques feuilles.

Que dire des raisons qui m'ont amené à quitter les Vosges? Vous serez bien sûr curieux et dubitatifs, encore une fois, sur votre fils. Je vais donc m'efforcer d'assouvir d'abord ces sentiments. D'abord j'aimerais bien que vous ne voyiez dans ce changement rien de catastrophique. Il se présente sous un jour très favorable avec cette lumière tamisée des grands renouveaux. Une sorte de sortie de l'immobilisme en petit. Nous avons accompli ici une période utile, nécessaire, fructueuse et elle est finie. Bien finie.

Annoncé avec une certaine avance, ce printemps, cette métamorphose se déroule dans un ordre une logique harmonieuse comme toute manifestation naturelle.

Vous avez déjà entendu, ou lu plutôt, que nous ne nous plaisions pas beaucoup dans l'appartement ici à cause du bruit des voisins, de la situation. Plusieurs demandes d'amélioration que nous avons adressé à la direction nous ont été systématiquement refusées malgré la mise en avant d'arguments médicaux concernant les enfants qui souffraient de cette situation.

Vous savez aussi que Janine très éloignée de sa famille n'était pas du tout dans son élément dans cette région froide. Elle a cependant patienté gentiment, ô combien gentiment, comme tout ce qu'elle fait d'ailleurs, où l'on retrouve l'empreinte profonde de la gentillesse dans le sens le plus senti du mot.

Vous imaginez aussi sans doute les difficultés matérielles qui l'ont amenée à reprendre du service. Et c'est précisément cette recherche du service qui nous a entraînés depuis le mois de Février à Douai chez son frère. Une place intéressante parmi les mineurs (de charbon) qu'elle tient depuis le 15 février a été le noyau où nous cristallisons en ce moment nos pensées. Habitant depuis ce temps-là chez son frère avec Dominique et Josquin et leur grand-mère, elle a cherché une habitation et actuellement nos espoirs semblent devoir être comblés au début de Juin.

De mon côté ici à Neufchâteau, je décrochais lentement mettant les choses bien en place avant de me retirer − le 31 mai est le dernier jour de mon service ici. Suivra le déménagement et la reprise du travail que j'espère dans la même partie à Douai. Cependant j'ai quinze jours de congé à partir du 15 mai et si vous m'écrivez faites le plutôt au

1 place Jemmapes à Douai Nord.

Je ne repasserai plus ici qu'en coup de vent. Je n'ai pas encore averti Roland de ce changement je veux le faire que lorsque je serais définitivement arrivé.

Pouvez-vous imaginer que Janine a été bien accueillie dans le Nord? (les salaires sont plus haut que dans les Vosges) Pour s'en faire une idée elle est tombée dans une équipe charmante de collègues Assistante qui à trois avait la charge de 12.000 familles. Lorsque Janine est arrivée elle a reçue ses 3.000 ce qui soulageait tout de même un peu les autres. C'est vous dire le manque de personnel et la noirceur du travail à entreprendre sans vilain jeu de mots dans ce pays minier.

Je pense être accueilli aussi favorablement dans ma branche. Quelques jalons plantés déjà permettent d'en augurer. Et l'apprentissage dans cette Ecole Professionnelle de Neufchâteau va me servir puissamment.

Mais je vais arrêter ces lignes il y en aurait tant et tant à vous raconter qu'à présent je dois y renoncer. J'espère que vous vous portez bien tous et je vous embrasse bien fort en formant de bons vœux comme toujours pour vous pour Toi

votre fils

Donald.