MATTHIJS VERMEULEN

Donald Van der Meulen

aan

Matthijs Vermeulen

Neuilly-sur-Marne, 21 juli 1948

Ville-Evrard

le 21 Juillet 1948

Cher Miau, chère Théa,

Voici que je viens de passer une bonne et longue semaine au lit. Le changement de traitement, passager, m'obligeait à me faire suer, au sens propre du mot, toute la journée sous les couvertures. Aussi, Thys, j'ai préféré attendre quelques jours pour te répondre. Tout d'abord parce qu'ayant la fièvre et les idées pas bien en place, je ne pouvais difficilement, et ensuite parce qu'écrire au lit ça suppose une écriture encore pire que celle-ci, où je m'applique pourtant sur ma table en plein air. Oui, car j'ai repris le traitement dont je vous ai déjà parlé et qui me laisse des après-midi à peu près normaux. Donc j'ai bien reçu ta dernière lettre [du] 13, Thys, qui a du croiser, sans doute la mienne. Elle m'a fait profondément plaisir cette lettre. Je comprends très bien tes reproches, bien délicats pourtant et moi-même je cherche dans le brouillard du passé et ne vois pas aussi comment il se fait que tu n'aies pas connu Trudi plutôt. Ce que tu écris sur elle m'a beaucoup touché, car comme tu la vois, c'était touché avec tant de précision, une corde si intime, qu'il était difficile de me remuer plus. Je croyais pourtant t'avoir écrit cela. Ta profession de Foi, faite avec cette ardeur que je te connais et que j'aime tellement en toi, ce fortissimo, m'a beaucoup ému et bien guidé. Je ne sais encore à travers quel labyrinthe j'étais passé, pour en venir à mépriser ainsi le corps. Je crois que ça appartient à l'inconscience du moins ce qu'on appelle communément ainsi. Une exagération des principes et des sentiments qui vous tiennent particulièrement au moment critique. D'ailleurs je ne [me] sens pas capable d'analyser ça en ce moment.

En tous cas, sois sans crainte Miaw, je suis tout à fait persuadé que c'était une erreur et que je la combats du mieux que je peux. Je relis ton passage souvent et ne reste un peu suspendu que sur ce point où je n'ose pas encore m'hasarder: que le Créateur considérait le corps d'un beaucoup plus haut prix que l'âme. Là j'ouvre de grands yeux. Je voudrais savoir comment tu développes cela. Je me doute que tu ne peux le faire dans une courte lettre et que je devrais lire "ton Aventure". Ça viendra.

Je viens de recevoir à l'instant la lettre du 18. de Théa que je remercie beaucoup. Je vois que tout va bien tant mieux. Jeudi dernier j'ai eu la visite, inattendue, du curé Besles accompagné de M^me Battedou et d'Aline. Comme vous voyez mon lit était bien entouré. J'ai eu ainsi les dernières nouvelles de Louveciennes et même les vieilles... Tous sont très gentils et très prévenants pour moi. Le jour avant, c'est à dire le 14, j'avais eu la visite de Christian qui m'apportait des nouvelles toutes fraîches de chez vous. Il avait l'air un peu fatigué de tous ses voyages. Il est curieux de remarquer comme sa présence dans la salle, les traces qu'il laisse, sont plus frappantes que celles de notre curé.

Liline pendant sa gracieuse visite où elle pense à tout m'a apporté "Plaisir de la musique" de Roland-Manuel que je lis ces jours derniers avec beaucoup d'attrait. Connais-tu ça, Miaw? C'est ainsi que je passe des journées agréables: de temps en temps le poste me donne l'extra d'un bon morceau, avec cette lecture claire ça fait un petit programme – de L'Evangile de Christian, un autre. Le courrier aussi. Cette lettre t'enverra mes meilleurs baisers, Miaw bien forts pour Thea aussi

Je pense bien à vous

Donald

Le 21-7-48

Cher Miau,

Le colis est arrivé en très bon état. Je l'ai eu le 12 Juillet exactement. Tu parles de la joie qu'il m'a fait. Je sens mes forces croître tous les jours. Et que de bonnes choses! Merci mille fois...

Pour te rappeler, il y avait dedans 1 paquet de margarine, 1 boîte de fromages, 2 coekes, 4 boîtes de citromalt et Nutrogen, 1 boîte de conserve avec du miel. 4 pots de confiture et 2 tubes de pâte d'anchois.

Pendant la semaine au lit, j'avais un lait chaud à 10^H du matin; pour moi ça faisait un bon chocolat et maintenant je me sens beaucoup mieux...

Au revoir!

Donald

aant.

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coekes: kruid- of gemberkoek